sexta-feira, 24 de fevereiro de 2012

Un mouvement social oublié: Chili, 1907, Santa María de Iquique

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par Sergio Grez Toso, décembre 2007

Le 21 décembre 1907, à Iquique, port de l’extrême nord du Chili, des centaines de travailleurs chiliens, péruviens et boliviens furent massacrés par l’armée et la marine chilienne devant les portes de l’école Santa María. C’est ainsi qu’un gouvernement oligarchique noya dans le sang la « grande grève » de la province de Tarapacá, un mouvement social spontané mais qui s’appuyait sur des organisations ouvrières en formation. Quelques mois plus tard, en 1908, à Valparaíso, naissait un certain Salvador Allende.

En ce début de XXe siècle, à la veille du premier centenaire de l’indépendance nationale, la « question sociale » est brûlante au Chili. Dans les mines de salpêtre, d’argent, de charbon et de cuivre, dans les entreprises portuaires, dans les usines de Santiago, de Valparaíso, de Viña del Mar, de Concepción et d’autres villes, une classe ouvrière qui commence à adhérer aux idéaux du socialisme et de l’anarchisme est en voie de constitution. Dès 1903, face à la prolifération des grèves et des mouvements de protestation, l’Etat, préoccupé par le maintien de l’ordre social, répond aux revendications prolétaires par des massacres successifs.

Tant la classe dirigeante que l’Etat baignent alors dans un contexte global de grande prospérité. Mais la dévaluation monétaire a fait chuter le taux de change du peso chilien de 18 à 7 centimes de livre sterling, entraînant une forte hausse du prix des aliments. Malgré la dégradation de leur niveau de vie et les dures conditions de travail, les revendications des ouvriers du salpêtre de la province de Tarapacá, à la fin de 1907, sont plutôt modérées. Ils demandent à être payés en monnaie légale et non pas en bons. Emis par les entreprises, ces derniers ne peuvent être échangés que contre des produits disponibles dans les commerces (pulperías) de ces mêmes entreprises, à des prix plus élevés que sur le marché libre.

D’autres revendications s’y ajoutent : liberté de commerce pour éviter ce genre d’abus ; stabilité des salaires en utilisant comme norme l’équivalent de 18 centimes (peniques) de livre sterling pour 1 peso ; protection pour les métiers les plus dangereux afin d’éviter les nombreux accidents mortels ; établissement d’écoles du soir financées par les employeurs pour les ouvriers. Dans les entreprises portuaires, ferroviaires et manufacturières, les travailleurs d’Iquique – l’un des ports les plus importants pour l’exportation du salpêtre – exigent pour leur part que leurs maigres salaires soient augmentés afin de compenser la diminution de pouvoir d’achat entraînée par la (...)

Source: http://www.monde-diplomatique.fr/2007/12/GREZ_TOSO/15386